dimanche 25 juin 2017

Åland (La Corse de la Finlande)

Comme on peut le voir, beaucoup de petites îles.
Et donc, après un agréable voyage en ferry depuis Turku, nous sommes arrivés à Åland. Åland (en Finnois "Ahvenanmaa", mais comme c'est un territoire autonome suédophone, on s'en fout un peu et j'utiliserai donc "Åland", parce que voilà.), j'en avais déjà parlé à plusieurs reprises. Dans la vidéo de mon premier aller-retour Helsinki-Stockholm, je le plaçais sur une carte en évoquant le surnom que j'aime à lui donner, à savoir "La Corse de la Finlande". J'y reviendrai. Mais aussi dans mon article sur le Jour de Gustave-Adolphe, où je le... plaçais sur une carte... encore... en évoquant rapidement le statut d'autonomie de ce bout de l'archipel de Finlande. Pour ceux qui n'auraient pas envie de cliquer sur de vieux articles, je vais être sympa et remettre la carte de l'article sus-mentionné. 

Donc, Åland, c'est là, entre la Suède et la Finlande continentale. On remarque qu'une vaste portion de l'Archipel de Finlande fait partie de ce territoire autonome, mais pas de loin pas la majorité (environ 6 500 îles sur les 40 000 que compte l'archipel.) (Enfin, ça dépend de comment on compte, les chiffres varient selon les critères de taille jugeant de qu'est-ce qu'une île et qu'est-ce qu'un rocher.):


J'ai déjà expliqué les origines du drapeau d'Åland et de la symbolique de ses couleurs exprimant sa double identité finnoise et suédoise, dans cet article. En résumé, le rouge rappelle le blason de la Finlande (rouge avec un lion doré), et le reste, ben c'est assez évidemment le drapeau de la Suède. Du coup je vais probablement récapituler les fragments d'infos que j'ai déjà glissés ici ou là histoire de résumer un peu tout ça, avant de passer à la partie visite. Oui parce que plus le temps passe et plus mes articles deviennent des succursales de wikipedia & co au lieu d'être un album de voyage. D'ailleurs, pour ceux que ça intéresse en détail, la fiche wiki d'Åland est ici. Moi, je vais faire la version courte et biaisée, hihi.

L'incontournable photo drapeau avec l'archipel derrière.
Afin de partir en ballade avec un contexte, il me faut évoquer brièvement l'Histoire d'Åland (j'aime la contextualisation). Avant même que le reste de l'actuelle Finlande ne soit soumise à la couronne suédoise, Åland faisait déjà partie du Royaume de Suède. Et comme c'était en quelque sorte une marche maritime stratégiquement placée dans le golf de Bothnie, la Suède y construisit une forteresse, le château de Kastelholm. Vous vous souvenez peut-être de l'anecdote des deux frères Jean III de Suède et Erik XIV ? Je vous avais dis que Jean avait fait enfermé son frère Erik à la santé mentale discutable dans différents châteaux et forteresses, y compris à Turku et... à Kastelholm ! C'était amusant pour moi et Céleste de voir cette ruine juste après avoir entendu cette anecdote à Turku. Tout est lié ! (Tout est toujours lié) (Vous aurez sans doute remarqué cette marotte que j'ai à tout lier).

Kastelholm en début de soirée. Les (autres) touristes sont partis, l'endroit est désert.
On fait le tour du château.

Les abords du château...
... et ses moutons.
L'Arbre du solstice d'été.
D'ailleurs, tout comme le château de Turku, Kastelholm s'est élevé avec le temps à cause de l'ajustement isostatique (le soulèvement de la croûte terrestre dû au recul des glaciers qui "l'enfonçaient" de leur poids, comme j'en avais déjà parlé dans l'article précédent, et comme wikipedia vous l'explique en détail ici.). Le "rebond", soit cette élévation du sol par rapport au niveau de la mer est de 50 centimètres par an à Åland, ce qui a obligé les habitants du château à creuser des douves quand la zone au sud de l'île sur laquelle celui-ci est construit s'est asséchée au XVIème siècle, soit deux siècles après le début de sa construction. Aujourd'hui le château est partiellement ceint d'un bras d'eau mais est facilement accessible par la route. D'ailleurs, à côté des ruines restaurées, il y a aussi un petit musée folklorique type écomusée d'Alsace, Seurasaari (Finlande) ou Den Gamle By (Danemark), en plus petit cependant. Comme nous y étions peu après les festivités de Juhannus, le solstice d'été, il y avait même encore les Arbres de Midsummar (j'en déjà parlais ici)

L'ensemble ressemblait d'ailleurs beaucoup à Seurasaari, en moins sylvain, et plus... insulaire. Le cadre est vraiment typique de ce que j'ai pu voir dans l'archipel de Finlande, comme Seili par exemple.




Notre hôte nous a expliqué que construire un moulin à vent était une marque de prestige pour les fermiers de l'archipel et qu'en conséquences, certaines zones avaient trois ou quatre moulins juste par concours de qui a la plus grosse et le plus de pognon. Là j'ai choisi une belle photo de ce moulin, mais en fait il y en a un deuxième juste à côté, hihi.
En 1809, après plusieurs occupations russes de l'archipel, Åland est officiellement cédé à la Russie (en même temps que le reste de la Finlande). Et comme c'est un point stratégique, ils construisent à leur tour une forteresse en 1832, un énorme complexe badass : la forteresse de Bomarsund. Qui dura 22 ans avant de se faire poutrer en 1854. Mais celle-là je la garde pour un second article sinon celui-ci sera beaucoup trop long.

Arrive 1917 et l'indépendance finlandaise. Pendant que le reste du pays se tape dessus dans une guerre civile, Åland, archipel suédophone, essaye de rejoindre la Mère Patrie Suédoise, ce que la Suède, à l'époque, voit d'un très bon œil. La Finlande, une fois déterminée à rester hors de l'Union Soviétique (victoire des Blancs sur les Rouges), considère la question du rattachement d'Åland à la Suède avec toute l'attention que mérite cette épineuse question à la fois ethnique et culturelle, et répond avec bienveillance : "Même pas en rêve". La Suède qui, un peu précipitamment peut-être, avait déjà commencé à occuper militairement le territoire d'Åland pendant la guerre d'indépendance, s'est retrouvée à devoir s'expliquer devant la Société des Nations (la version 1.0 de l'ONU) face à la Finlande, en mode Jawad "On nous a appelé, on a voulu rendre service !". La SDN ne voit pas les choses de cette façon et Åland restera finlandaise... MAIS, quand même, le peuple a été entendu, et l'archipel se voit octroyer en 1920 le statut de région autonome.

Et depuis Åland c'est la Corse de la Finlande : on est dedans, mais on dit tout le temps qu'on voudrait en sortir, sauf que bon, concrètement on perdrait toutes sortes d'avantages à être dedans, donc en fait on veut pas vraiment en sortir.

Les avantages en question vont d'une fiscalité indépendante du reste de la Finlande (et apparemment plus agréable au contribuable et au commerce), la démilitarisation - donc pas d'obligation à faire le service militaire, comme le reste des jeunes Finlandais ! - des tarifs avantageux (par exemples les tarifs postaux), des aides au développement, monolinguisme protégé par les traités (alors que le reste de la Finlande est officiellement bilingue), etc. Ils ont même un droit de veto sur l'application des lois nationales si les décisions d'Helsinki ne leur plaisent pas. Bref, le statut d'Åland est assez confortable, et ils n'en sont pas peu fiers. Dès le débarquement du ferry à la capitale Mariehamn, un panneau vous accueille sans ambages :

"Åland : Autonome et démilitarisé. Bienvenue !" ou "Haha, pas de service militaire, moins d'impôts, suck on it, Helsinki !" Une version anglaise pour les touristes, que dalle en Finnois. Mais un petit drapeau européen quand même, hein ! Et oui, le blason de la région c'est House Baratheon.
Au moins le ton est donné.

Et moi je vais peut-être commencer la partie visite sinon on va jamais s'en sortir.

Une rue de Mariehamn.
Nous débarquons donc à Mariehamn, la seule véritable ville d'Åland, les autres localités n'étant que de petits hameaux éclatés. A première vue nous sommes en terrain connu. L'architecture des maisons et les couleurs sont définitivement dans le pur style nordique comme vous avez pu en voir dans mes articles sur la Finlande et sur l'Islande. D'ailleurs, certaines rues m'ont fortement rappelé Reykjavík, je ne saurais dire pourquoi... quelque chose dans les alignements et les couleurs... bon sauf qu'ici, les façades sont bel et bien en bois, pas en tôle ondulée comme en Islande. Mais c'est vraiment au détour de ces rues-là que l'harmonie du style nordique est fascinant, malgré les longues distances qui séparent la Carélie d'Åland et Åland de Reykjavík, et les différences culturelles (car il y en a !).

Pendant ce week-end de vacances en pays suédophone nous avons été hébergés par Mats, un couch-surfeur très, très sympa qui non-seulement nous a offert son canapé pour dormir, mais nous a également promené en voiture et invité au barbecue chez ses parents, dans le jardin d'une maison en bois toute mignonne entre la forêt et les champs. Bref, on a eu beaucoup de chance de tomber sur lui, c'est toujours un peu l'incertitude quand on passe par couch-surfing.

Pour donner une idée, voici quelques photos prises à proximité de la maison de ses parents où nous avons été invités. Je trouve que ça plante relativement bien le décor d'Åland.





Outre nous avoir baladé sur les sites à voir, il nous a également permis d'avoir un aperçu de la mentalité locale. Et quelle ne fut pas ma (non) surprise quand ses anecdotes sur la vie quotidienne d'Åland vinrent confirmer mon impression : il s'agit vraiment de la Corse de la Finlande ! Entre les contrats publics qui fonctionnent à mort par copinage et par les liens familiaux, et la mentalité "aujourd'hui peut-être, ou alors demain !" avec des travaux qui n'en finissent pas et des entreprises qui profitent du statut de l'île et de sa position (très relativement) isolée pour appliquer des tarifs de mafieux, les pièces du puzzle s'assemblaient parfaitement, et mon intuition se voyait confirmée.

(Bon, à ce stade j'imagine que je me dois de m'excuser auprès des Corses pour cette avalanche de comparaisons peu flatteuses) (du coup je vais essayer de rattraper ça)

Mais être la Corse de la Finlande, ça veut aussi dire avoir de superbes paysages baignés par la lumière du soleil du Sud. Même si là encore, le Sud est tout à fait relatif. Mais ça a suffi pour me prendre un über-coup de soleil lors d'une ballade à vélo. On est parti le matin, on a loué deux vélos, et j'ai mis de la crème. Vers 10h on s'est arrêté dans un coin sympa, j'ai remis de la crème. Et après, ben... j'ai oublié. Et à la fin de la journée j'avais la main gauche tellement cramée qu'elle avait gonflé comme quand on souffle dans un gant. Mais bon, une grosse couche de Nivéa et le tour était joué, ahem... après quelques jours... Mais ça valait la peine ! Grâce aux nombreux ponts on a pu descendre le long d'un chapelet d'îles - sans croiser beaucoup de voitures - avec de chouettes paysages.





Bon, on était censé atteindre une plage magnifique, mais le plan qu'on nous a donné à l'office du tourisme était une carte photocopiée pourrie, sans échelle, sans énormément de noms ou de repères, et du coup, bah on l'a cherchée longtemps, cette plage, et on l'a pas trouvée. Donc on n'a pas nagé, mais on a bien pédalé !

Et moi je m'arrête là pour ce premier article sur Åland, la suite bientôt un jour, promis.